Errances amoureuses

Errances amoureuses

Dernier film d’Emmanuel Mouret, Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait est une tendre variation sur les incohérences de l’amour. Nous avons rencontré le réalisateur. # Hervé Lévy

Discret dans le paysage cinématographique français, trop sans doute, Emmanuel Mouret est l’un des réalisateurs les plus intéressants de sa génération, observateur délicat des circonvolutions des sentiments. Après le très réussi Mademoiselle de Joncquières (2018), inspiré de l’histoire de Madame de La Pommeraye insérée dans Jacques le Fataliste et son maître de Diderot, il nous propose un éblouissant chassé-croisé amoureux tendant à prouver que le XVIIIe est son siècle de prédilection. Si Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait se déroule aujourd’hui, il s’agit néanmoins d’un marivaudage rondement mené utilisant un mode narratif très en cour à l’époque fait de flashbacks et de récits imbriqués formant une mécanique sentimentale huilée à la perfection que le réalisateur résume ainsi : « J’aime les récits dans lesquels on prend de la hauteur, pour tout d’un coup plonger dans les petits détails, créant des effets d’aller-retour. »

Le film débute avec Daphné, éblouissante Camélia Jordana, toute en retenue et en subtilité. Enceinte de trois mois, elle est en vacances dans une jolie maison de campagne et accueille Maxime (Niels Schneider, timide, maladroit et touchant), qu’elle ne connaît pas, le cousin de son compagnon absent pour cause de travail. Peu à peu, ils vont se raconter leurs histoires d’amour réciproques. Emmanuel Mouret souhaite que « ce film soit une ode à notre inconstance, à nos maladresses. Aujourd’hui existe une forme de tyrannie de la morale qui nous enjoint avec force à mettre en rapport nos paroles et nos actes, à être cohérents. Mes personnages font le contraire » et plutôt que de les juger il « prend le parti de la douceur, de l’indulgence. » Deux heures durant, le spectateur est entraîné avec jubilation dans cette ronde des désirs accompagnée d’acteurs éblouissants, au premier rang desquels figurent Émilie Dequenne, ambivalente et envoûtante dans un rôle bigger than life, et Vincent Macaigne, parfait as usual. Nous assistons à un feu d’artifice de désirs mimétiques – René Girard est du reste convoqué au coin d’un plan – accompagné par une bande-son en forme de best of classique où Purcell tutoie Chopin, Tchaïkovski, Poulenc, Satie ou encore Vivaldi permettant de mettre en musique l’efflorescence des sentiments sur l’écran.


Sortie le 16 septembre

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